dimanche 11 juin 2017

Dimanche poétique 305: Etienne de la Boétie


Idée de Celsmoon.


II.

C'est amour, c'est amour, c'est luy seul, je le sens:
Mais le plus vif amour, la poison la plus forte
A qui onq pauvre coeur ait ouverte la porte.
Ce cruel n'a pas mis un de ses traictz perçans,


Mais arcq, traits et carquois, et luy tout, dans mes sens.
Encor un mois n'a pas, que ma franchise est morte,
Que ce venin mortel dans mes veines je porte,
Et des-ja j'ay perdu, et le coeur et le sens.


Et quoy? si cet amour à mesure croissoit,
Qui en si grand tourment dedans moy se conçoit?
O croistz si tu peuz croistre, et amande en croissant.


Tu te nourris de peurs: des pleurs je te prometz.
Et, pour te refreschir, des souspirs pour jamais.
Mais que le plus grand mal soit au moings en naissant.

Etienne de la Boétie, Vingt neuf sonnetz d'Estienne de la Boëtie, dans Poètes du XVIe siècle, Paris, Gallimard/La Pléiade, 1953/1991, éd. par Albert-Marie Schmidt.



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